AVANT PROPOS
Que peut bien se dire un homme placé en détention un beau matin d’octobre et transféré en région parisienne où il restera incarcéré jusqu’en décembre avant d’être assigné à résidence en région lyonnaise et pouvoir retrouver sa maison en août de la même année ?
Devait-il renier une conférence de presse où il déclarait être solidaire d’un combat pour l’indépendance de la Corse ? Mais quel texte de loi interdit d’avoir cette conception de l’avenir de l’île ?
Devait-il condamner ceux qui, se glissant au sein de cette manifestation, ont revendiqué des tirs sur une caserne de gendarmerie ? Cette action, il ne l’avait ni dirigée, ni suscitée et n’y avait participé en aucune manière.
Malgré une grève de la faim engagée dès les premiers jours de sa captivité, l’homme demeura donc privé de sa liberté plus de deux mois, subissant les humiliations et les refus catégoriques d’un élargissement sous contrôle judiciaire.
Certes, il fut soutenu, par un comité de soutien, immédiatement crée à son intention, qui se démena du mieux qu’il put pour alerter l’opinion et mobiliser les élus.
Certes il reçut un nombre impressionnant de témoignages de soutien (écrivains, artistes, hommes politiques de tous bords, anonymes...
Certes l’initiative lancée par les éditions Albiana, en permettant à tout un chacun d’apporter une contribution créative en sa faveur fut une brillante réussite...
Certes cette privation de liberté lui permit de s’adonner à sa passion, nos donnant ainsi à lire un ouvrage passionnant qui nous permet de suivre sa galère
Mais au final que de souffrances, que de solitude !
Il y a, bien sûr, la solitude de l’homme pétrifié entre les quatre murs de sa geôle mais aussi la solitude d’un combat désespéré qui ne convainc plus grand monde en Corse. Si les parlementaires de l’île et les représentants de l’Assemblée n’ont pas hésité à prendre position en sa faveur. Le nombre de pétitionnaires représentant le grand public et celui des élus de proximité lui ayant apporté son soutien est bien là pour témoigner du gouffre abyssal séparant l’idéal mis en exergue du sentiment général de la population insulaire.
C’est précisément parce que cet homme est seul que je l’ai soutenu. Il ne s’agit en aucune manière de la solitude de l’esthète considérant le bas monde avec dédain, ni de la solitude de l’individualiste forcené ne jurant que par l’importance de son nombril mais d’une autre forme de solitude. Celle de l’individu placé devant des choix qu’il assume mais qui lui paraissent avoir été trahis.
Le problème étant de savoir si la trahison trouve sa source dans les hommes qui ont détourné un message initial ou du message lui-même qui, au fil du temps, révèle des failles, à moins que ce ne soit le réel lui-même qui a décidé de s’affranchir du cadre conceptuel dans lequel on avait voulu l’enserrer
Nous nous posons tous ces questions, ou plutôt, nous devrions nous les poser car ce scepticisme est le meilleur rempart contre tous les aveuglements qui ne sont que les préludes aux fourvoiements.
C’est, à n’en point douter, cette zone incertaine de la conscience que j’ai souhaité explorer.
Dans l’apparent dissonance des propos, un fil intrépide s’est peu à peu dénoué.
Il reste bien quelques nœuds, quelques entrelacs et de nombreuses zones d’ombre mais, sans toutes ces entraves, connaîtrions-nous ce que nous nommons habituellement la vérité ?
Il nous reste encore à faire, soyons-en certains